MARIE MOLLIENS

AUTEURE, METTEUSE EN SCÈNE, FILDEFÉRISTE, VOLTIGEUSE

Dès son enfance, Marie Molliens fait partie des spectacles de la Cie Rasposo, fondée par ses parents en 1987. Très jeune, invitée avec sa famille à jouer dans de nombreux festivals, elle grandit avec les arts de la rue, alors en pleine effervescence. L’audace, le rapport direct au public, l’esprit de contestation et « la nécessité de l’indiscipline », la nourrissent encore dans son travail.
Elle complète sa formation à l’école nationale du Cirque Annie Fratellini à Paris, élève du grand professeur de fil, Manolo Dos Santos. Auprès du professeur hongrois Géza Trager, elle fait du main à main sa 2ème spécialité. Parallèlement, elle entame un parcours universitaire à Paris 8, en Arts du spectacle.

Fildefériste et voltigeuse d’exception, Marie Molliens prend la direction artistique de la compagnie en 2012. Elle écrit et met en scène des spectacles où l’intime dialogue avec l’universel, où la technique irréprochable se conjugue à une dramaturgie exigeante et à une esthétique singulière. En 2014, elle reçoit le prix des Arts du cirque de la SACD.

Parmi les rares femmes à diriger un cirque sous chapiteau, elle revendique le modèle familial et itinérant, tout en affirmant un cirque résolument contemporain, qui allie, de manière organique, de multiples langages à la croisée des arts.

Sa trilogie fondatrice (2013-2019) questionne les codes ancestraux du cirque. Après Morsure (2013), spectacle féroce, La DévORée (2016), déclaration d’amour au théâtre, Oraison (2019) s’impose comme un manifeste esthétique. Il clôt cette trilogie des Or, avec plus de 350 représentations en Europe.

Invitée par le CNAC en 2022, elle crée Balestra, le spectacle de fin d’étude de la 34ème promotion.

« Entre cirque et théâtre, son écriture circulaire déploie des tableaux vivants où les numéros portent une dramaturgie perlée d’émotions et s’insèrent dans un mouvement chorégraphique et une composition picturale qui font de chaque création une œuvre totale. Marie Molliens transcende ce qui lui a été transmis : la rue et la piste, l’amour du risque, un corps sensible et une âme battante. Ses spectacles revêtent une dimension politique, car elle transforme sa sourde mélancolie du cirque classique en cri de révolte » Léna Martinelli

Aujourd’hui, la compagnie Rasposo compte parmi les grandes aventures du cirque contemporain en Europe.

Mais aussi, mise en piste et regard extérieur pour :

« Quand Marie Molliens paraît, on est saisi par la grâce de l’artiste formée auprès des plus grands maîtres et un travail personnel impeccable, autant que par l’indéfinissable lumière qui émane d’elle, marque des plus grandes. Acrobate au sol, en main à main, portés ou banquine, fil-de-fériste dont la virtuosité le dispute à l’invention, directrice de troupe, entrepreneuse aussi, qui offre à d’autres la possibilité d’exercer leur art, l’auteure, dans la composition de ses spectacles, conjugue les archétypes de la piste et une contemporanéité, que, femme de cirque d’aujourd’hui, elle porte avec ardeur. Comme Circé la magicienne, fille du Soleil, qui offrit son nom au cirque, Marie Molliens, Étoile dans la piste, joue des métamorphoses entre femme, homme, animal et esthétiques. Qu’on ne s’y trompe pas : cette grande auteure est une véritable saltimbanque, engagée au cœur d’un art qu’elle vit dans toutes ses dimensions depuis ses plus jeunes années. A l’évidence, sa pratique, sous tous ses aspects, porte ses spectacles et sa vie. A celles et ceux qui attendent du cirque un propos qui devrait le sous-tendre, elle répond en acte : être artiste de cirque est un propos, vivre le cirque un manifeste, artistique, esthétique et politique, où l’artiste, à ses seuls risques, engage son existence entière, qui est son œuvre. Chère Marie Molliens, nous sommes très honorés de votre présence parmi les auteurs de la SACD. »

Philippe Goudard , Administrateur délégué des Arts du Cirque à la SACD. Remise du prix SACD 2014

MANIFESTE POUR LA DÉFENSE DU CIRQUE SOUS CHAPITEAU

« J’avais envie de parler d’une problématique liée au chapiteau dans le cadre de ce festival d’Aurillac, festival de théâtre de rue, parce qu’il me semble que les arts de rue sont plus libres, plus en avance à un certain niveau, celui de porter un propos, de soulever un questionnement, d’avoir une parole libre. Ils ont dépassé le stade du divertissement. Avec le cirque sous chapiteau, hélas, nous n’en sommes pas encore là du tout.

En effet, dans l’imaginaire collectif, le chapiteau a une connotation familiale, enfantine, festive, il en est complètement prisonnier. Le cirque n’est autorisé à faire de la création contemporaine que dans les salles, alors que sous chapiteau, il doit se cantonner à faire du divertissement. Pourquoi ? Parce qu’il me semble que la place réservée à la diffusion de cirque sous chapiteau est beaucoup trop souvent celle du mois de décembre, de Noël, celles des représentations scolaires, et surtout pour remplir les colonnes de fréquentations des scènes nationales. Mais aussi, à cause de la frilosité de programmateur qui ont peur de décevoir « leur » public, en programmant du cirque sous chapiteau qui ne correspondrait pas au modèle traditionnel qu’ils attendent.

Je pense que le cirque à autre chose à proposer que du divertissement, je pense qu’il ne faut plus infantiliser le public de cirque sous chapiteau, sous prétexte qu’il véhicule une désuétude bohème, nous ramenant à nos images enfantines.

Mes projets s’inscrivent dans l’envie obstinée de faire perdurer l’existence de création sous chapiteau, car il apporte pour moi, comme au théâtre de rue, un rapport direct au spectateur, une relation immédiate avec le public. Le spectateur y est plus proche qu’ailleurs, en relation immédiate avec ce qu’il se joue. Le chapiteau, c’est pour moi du vivant près des yeux, une expérience de vécu, atteindre le temps d’une représentation quelque chose de réel, dont tout concours à nous éloigner, par l’omniprésence du virtuel. Il faut que l’art vivant réponde à notre désir désespéré, parfois, de nous sentir vivant. »

Marie Molliens, Extrait du billet d’humeur, Don du sens, Aurillac 2016